Enterrer les choses qui font mal. Fermer les yeux durant des
années, qui deviennent des décennies. Des souvenirs qui dorment à poings
fermés, loin de la mémoire vive. Leur disparition nécessaire à la survie. La
mémoire qui s’empare de souvenirs insoutenables, pour les engloutir au nom de
la santé mentale. Des pans entiers de vie qui se retrouvent enfouis, loin,
comme une vie oubliée. Parfois ils viennent chatouiller inconfortablement la
surface de la mémoire, mais ils sont rapidement relégués encore plus
profondément aux confins des oubliettes de la mémoire.
Les traumas sont souvent enfouis ainsi. J’ai vécu beaucoup,
beaucoup de traumas. Une partie de moi a fait un tri, un choix. L’une des
raisons de mes traumas se trouvant dans mon environnement durant des années,
certains souvenirs se sont enfuits de ma mémoire. Pour rendre la vie
supportable. Pour que chaque jour ne soit pas un calvaire.
Un fois sortie d’un milieu toxique, j’ai pu commencer à guérir.
De multiples commotions et d’une armée de traumas qui sont remontés et des circonstances
d’une séparation qui ne fut pas de tout repos. Plus une pandémie pour tous.
Depuis, je vais franchement bien et je me retrouve. Sortie de mon milieu
toxique et guérie, j’ai remis mes morceaux ensemble. Parfois, cette impression
tenace qu’il me manquait des morceaux. Parfois un manque de cohérence, aussi mince
soit-il. Et l’intuition que certaines choses m’échappaient. Mais rien à faire,
je ne pouvais avancer plus loin.
J’ai continué d’avancer, puis tout à coup, certains
événements sont venus déclenchés des déclics. Comme des chevaux sauvages qui
retrouvent leur liberté, une quantité de souvenirs sont remontés en cavalcade à
la surface de ma mémoire.
Je suis plus à même de digérer et surtout, de voir les bienfaits.
En effet, même si certains souvenirs sont vraiment très lourds et traumatisants,
ils expliquent tellement de choses qui restaient comme des interrogations suspendues
dans mon âme guérie. J’éprouve un soulagement à me comprendre et à pouvoir me
voir en entier. Je préfère connaître mon histoire au complet, ne rien omettre
et savoir absolument tout. Même ces pans de ma vie qu’une part de moi avait
fait couler dans les abîmes de mes oublis personnels.
Ces souvenirs douloureux, ces traumas, ils font partie de
moi, de mon histoire. Ils expliquent tellement de choses qui m’étaient
troublantes et inexplicables. Je dois absorber, oui, mais je compose beaucoup
mieux avec cela, qu’avec le fait de chercher des réponses sans espoir… dans ma
propre personne. Marcher dans un noir complet alors que je sais, que je sens, mais
qu’il me manquait des bouts de moi.
Ça fait vachement mal. Mais ça soulage et, je peux achever
ce qui a été commencer il y a trois ans. La mémoire est une chose curieuse aux
pouvoirs puissants. Je crois cependant à la lumière de ce qui se produit dans
ma vie en ce moment, qu’elle est très bien faite. Je n’aurais pas été prête
avant. J’aurais sans doute croulé sous l’amas de traumas supplémentaires. Je
suis mieux armée pour affronter, comprendre et m’assembler en un seul morceau,
une fois pour toute.
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