Tuesday, March 8, 2022

L'intrus

 


Avec le recul. Un recul de quelques années récentes, de multiples guérisons à divers niveaux. Avec le recul d’une femme qui a maintenant plus de moyen pour comprendre les événements, et se comprendre elle-même. Une chose me paraît plus claire; ma rencontre avec mon Mari. Cela m’a longtemps agitée. Troublée. Dès le départ et même une fois que nous avons unies nos vies, scellées par un premier baiser. Je parle beaucoup de cette manière qu’il a eu de me voir, de cette manière que j’ai eue de le voir. Je parlerai ici, que de la portion qui me concerne. J’ai été rapidement troublée par ses observations justes, cette impression paniquante que pour la première fois de ma vie, quelqu’un me voyait. Pour de vrai. Vraiment. Même les choses que je cachais, les ombres et la lumière (miennes et autres) avec lesquelles je jouais. Qui voyait immédiatement les dessous de mes mots et mes sourires. Oh! Je l’ai mené sur d’autres pistes souvent… sans lui laisser savoir à quel point il voyait et disait et visait juste. Il m’a donné des frissons mais aussi, des sueurs froides. Je me suis demandé ce qui se passait, et j’étais affolée, pour être bien honnête. Je me promenais dans ce monde, trimballant mon jardin intérieur derrière mes murs, ceux de ma forteresse sans une aucune porte, ni aucune issue. Là ou j’étais seule et en sécurité depuis entre mes quatre et six ans. Là ou a débutée la construction de cet endroit, le seul ou je me sentais en sécurité. Cet espace entre les mondes, que je portais en moi. Cet endroit ou mes fils avaient été les seuls à fouler le sol. Sans avoir conscience de ce qu’ils voyaient, de l’accès naturel et privilégié à la fois, que je leur offrais de manière inconditionnelle.

Avec le recul, je comprends que celui qui est devenu mon mari, ne faisait pas que voir. Il avait trouvé un chemin vers mes jardins, il avait franchi les infranchissables murs dont je m’étais entourée depuis ma tendre enfance. Il était entré sans même y être invité, bousculant l’ordre des choses. Mon ordre. Il a trouvé un chemin menant directement à… moi. Je me suis empressée de jeter entre lui et moi, mes meilleures illusions. Brandissant mon mariage faussement parfait avec beaucoup de conviction. Finalement ce fut en vain, car il connaissait le chemin, sans le savoir. Il a touché mon cœur et d’y est installé. Ou plutôt, il y avait déjà sa place et son empreinte, comme son nom éternel, de gravé. Je l’attendais, mais je n’y croyais plus. Lui, force est de convenir, qu’à force de me chercher, il est finalement arrivé à destination. Il m’a trouvée. Ses souffrantes recherches n’auront pas été vaines.

Assez drôlement, je le taquine souvent, quant au fait qu’il n’a rien vu et rien fait pour faire un pas vers moi, avant LE pas. Et il me rapppelle très justement qu’il a été chevaleresque, respectueux et très malheureux. À ses yeux, j’étais mariée et heureuse, il n’était qu’un ami. Et qui plus est, il ne croyait même pas me plaire physiquement, tant je jouais bien mon jeu. Malgré ce qu’il sentait entre nous et ressentais pour moi, cela lui semblait sans issue. Il a donc choisi la voix de l’amitié, et du respect. Chevaleresque. Il me dit souvent qu’eut-il su, eut-il eu un seul indice, un seul doute de ma réelle situation, les choses auraient été différentes. Il aurait fait un ‘’move’’ plus rapidement.

Je n’étais cependant pas prête, et j’ai eu peur. Terriblement peur. Sans blague. J’ai si bien brandie mes illusions entre nous, que moi-même j’ai cru qu’il ne réciproquait pas mes sentiments. Il y avait des phénomènes, une chimie et une électricité indéniables entre nous. Je mettais cela sur le compte d’un lien karmique, d’une ancienne vie, mais rien dans cette vie-ci. J’aurais dû comprendre, j’aurais du savoir, que le seul humain, le seul homme a touché mon cœur, à trouver un chemin qui n’existait pas, vers moi… devait être mien. Ici et maintenant. C’était trop beau. Ça n’existait pas. Il était trop beau, trop jeune, trop gentil, trop brillant. Pour être vrai. Je me rends compte que j’ai tout fait pour nous avorter, nous bousiller, pour au fond, me protéger. De manière égoïstement à survivre, seule, comme je l’avais toujours fait. Mettre mon cœur en danger? Non. Nope. No way.

Je sais maintenant que c’était aussi futile qu’inutile. J’avais devant moi un géant doux, tendre… que nos liens allaient réveiller. Réveillant ses sens, son courage et sa ténacité. Il n’allait pas renoncer aussi facilement, une fois les liens mis à nus, et mon cœur laissant filtrer sa vérité. Du moment qu’il a su, qu’il a senti, il n’avait pas beaucoup d’espoir, voir pas du tout, mais il a suivi son cœur. Je le trouve très courageux. Je salue son courage, et je le remercie. Moi, j’avançais vers nous à pas de tortue, mais lui, tout en étant délicat, avançait plus rapidement que moi.

Au fond, il me voyait telle que je suis, et moi, je me sentais capable de me déposer, souvent malgré moi. Me surprenant à être si à l’aise en sa compagnie. Difficile de décrire notre dynamique trop naturelle pour être ignorée. Au fond, il avait simplement trouvé enfin son chemin, celui le memant à moi. Un chemin qu’il s’est défriché, qu’il s’est forgé, au fil de ses recherches aux issues douloureuses. Il est entré de plein fouet dans mon jardin, là ou je cachais mon cœur. Il est arrivé au moment ou je ne l’attendais plus. Je ne l’ai même pas invité à entrer! Je comprends seulement maintenant, que c’est parce qu’il était déjà chez lui. J’étais sienne, il était mien. Nous venions de nous retrouver. Il nous faudrait cependant du temps pour assimiler, comprendre, se souvenir. Accepter cette folle et magnifique réalité déjantée et alchimique.

Au fond, il m’a trouvée. Il est rentré chez lui. Mon cœur était déjà sien. Son cœur était déjà mien. Oui, cette histoire est vraie. Si on me la racontait, sans que je ne l’aie vécue (et la vive encore) je n’y croirais pas, moi non plus. Et pourtant, nous voici. Ensemble. Envers et contre tout. Ici et maintenant. Pour tous les toujours.

2 comments:

Anonymous said...

Very touching.
Emcee

Anonymous said...

J'ose encore espérer, vivre une chose pareille.
Lilas.

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